Le gouvernement va augmenter de 2,5% le taux d’imposition sur les sociétés rejoignant ainsi le taux mondial imposé aux multinationales.
C’est une petite révolution du modèle économique de l’Irlande. Après des mois de résistance à l’accord international signé par plus de 130 pays sous l’égide de l’OCDE, le gouvernement a fini par accepter de céder sur son sacro-saint taux d’imposition des sociétés de 12,5 %. Il l’a officialisé jeudi en fin d’après-midi, à l’issue d’un Conseil des ministres.
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En vigueur depuis 2003, ce taux plancher a été le pilier de l’attractivité du «Tigre celtique» pour les investissements étrangers et à l’origine d’une insolente croissance. En échange, Dublin a obtenu une concession de taille: l’assurance que le taux de 15 % retenu pour l’imposition mondiale des multinationales soit un maximum et non plus un minimum. La notion d’«au moins» 15 % dans l’accord signé au G20 Finances en juillet a été supprimée d’un nouveau document communiqué cette semaine. Désormais, «c’est 15 % ou rien», confirme le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire, à la manœuvre pour rallier son homologue irlandais. «Cela améliore considérablement la situation de notre point de vue», s’est réjoui le premier ministre, Micheál Martin.
Par ailleurs, l’Irlande a obtenu la garantie de pouvoir continuer à appliquer son taux de 12,5 % à ses entreprises locales, celles dont le chiffre d’affaires est inférieur à 750 millions d’euros. «La grande majorité des entreprises ne sera pas impactée», a relativisé le chef du gouvernement. La mesure est en effet plutôt impopulaire: 59 % des Irlandais se disent opposés au ralliement du pays au taux mondial de 15 %, selon un sondage Ipsos/Irish Times cette semaine.
Intense pression
L’État risque d’y perdre quelque 2 milliards d’euros de recettes fiscales, sur environ 12 milliards d’impôt sur les sociétés collectés annuellement. Au-delà des 15 %, le manque à gagner portera surtout sur le «pilier 1» de la réforme, qui prévoit une redistribution d’une part des bénéfices des sociétés dans les pays où l’activité a réellement lieu.
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Ainsi, Apple ou Google pourront faire remonter moins de profits dans leur structure irlandaise, où ils étaient moins taxés qu’ailleurs. «Cela ne devrait pas pousser les géants de la tech ou de la pharmacie déjà présents à quitter l’Irlande, souligne Dan O’Brien, économiste à l’Institute for International and European Affairs, à Dublin. Mais cela pourra peser sur l’attractivité du pays dans les flux d’investissements futurs.»
Sous intense pression de Washington depuis l’arrivée de «l’Irlandais» Joe Biden à la Maison-Blanche, il devenait difficile pour Dublin de continuer à bloquer. D’autant que l’unanimité des Vingt-Sept est nécessaire à l’entrée en vigueur de la réforme, via une directive, que la France compte pousser lors de sa présidence de l’UE, au premier semestre 2022. Après l’Irlande, l’Estonie, encore réticente, devrait pouvoir trouver un compromis compatible avec son régime fiscal particulier, axé sur les dividendes. Reste le cas de la Hongrie, dont le taux d’impôt sur les sociétés est de 9 %, qui négocie main dans la main avec la Pologne des exemptions particulières pour les filiales industrielles des multinationales.La rédaction vous conseille
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